Journée calme
Journée calme.
C'est étrange...dès que ma famille se retrouve amputée d'un ou de deux
membres, je trouve que tout est beaucoup plus calme.
Est-ce réellement le nombre de personnes qui crée la sensation de "trop plein"
que je ressens généralement ?
Serais-je plus apaisée si je n'avais que deux enfants ?
A chaque fois qu'un enfant ou que le mari part, le temps d'une journée ou
quelques jours, à chaque fois je ressens un calme intérieur.
Je ne crie presque pas, je me sens bien, pas fatiguée, cool, zen, détendue. Il
y a toujours les mêmes taches du quotidien à accomplir, mais elles me pèsent
moins.
Alors qu'est-ce qui ajoute du "poids psychologique" à mon état d'esprit
?
Le nombre ? Peut-être...
Pourtant combien de parents d'un ou deux enfants me regardent éberlués avec
mes 4, me demandant comment je tiens le coup alors qu'eux-mêmes avec un nombre
inférieur d'enfants, se sentent couler...C'est si courant comme réflexion que
je finis toujours par les rassurer en leur expliquant que les miens
sont plus grands, plus autonomes, et que surtout, il ne viennent pas m'envahir
vu qu'ils ont assez de frères et sœurs pour s'occuper entre eux !! "C'est
différent!"... Donc...Le nombre d'enfants?
Que ce soit le plus turbulent des enfants ou le plus calme qui s'absente, mon
constat est le même, c'est calme. La paix ne dépend donc pas du profil de la
personne absente. Il y a moins de disputes, voire pas du tout. Une sorte
d'apesanteur règne dans la maisonnée.
Sommes-nous tous conscients de ce manque
? et par conséquent tous un peu en apnée, nous demandant ce qui va se passer
sans untel ou untel, et dans l'attente de son retour ?
Je m'interroge...
Si ce n'est pas le profil de l'absent, si les tâches n'ont pas changé, ce
sentiment est soit dû au nombre de personnes dans la famille (mais pas complètement convaincue vu le témoignage des autres), soit à ce
souffle qu'on retient tous, soit au changement qui provoque un bien-être
automatique...Le changement pourrait libérer de l'ocytocine ? Théorie
intéressante à explorer.
Il y a tout de même un hic, voyez-vous, quand un enfant s'en va, ou le mari, je ressens un grand vide, et
mon esprit focalise dessus, si bien que j'ai presque l'impression qu'il est
toujours avec nous. Tel un fantôme, un souvenir ambulant traînant ses
casseroles d'habitudes, bonnes et mauvaises, et son caractère.
Je me sens privée d'un membre, réellement amputée, c'est comme si je ne
pouvais plus rien faire car il me manque ce membre.
"Tu devrais en profiter, tu vas être plus tranquille ! Fais des
trucs que tu n'as pas le temps de faire d'habitude !"
Ah oui ? Comme quoi ? Vider les placards pour les nettoyer, les désinfecter et tout bien reranger ? Ou enfin faire la pyrolyse que je repousse depuis 6 mois parce que ça enfume toute la maison ? Ou me casser le dos à repeindre ces escaliers détruits par toutes ces petites paires de pieds ? Trop cool !
Ou juste m'amuser, me détendre...Oui...en théorie c'est comme ça que ça devrait marcher.
Dans la pratique, je suis un cul de jatte, une estropiée, une manchote...sans ma famille au complet.
De plus, n'ayant pas de loisirs, n'étant pas argentée, je ne sais pas ce que c'est de
faire les boutiques, prendre un café dans un bar, aller au ciné, au resto,
sortir avec des copines, visiter un musée, prendre le train pour aller visiter
un endroit sympa.
Je suis une nonne, une mère au foyer vivant pour ses enfants, pour sa famille, entre les mêmes 4
murs toute l'année. Travaillant quand le travail arrive (les clients c'est un
sacré défi pour en trouver dans mon domaine), et instruisant les enfants en IEF.
Alors Dieu merci j'ai mes espaces détente que j'impose à tous. Ils sont
simples et gratuits : un café chocolat, un livre, un jeu sur mon pc ou mon
téléphone. C'est à peu près tout. Ce qui n'est pas pour déplaire au ptit mari. Je ne lui coûte pas trop cher !
Le potager me déprime car je n'arrive à rien faire pousser, entre
les limaces et les rongeurs qui anéantissent des mois de travail et de semis. Alors on ne
peut pas dire que je m'y détende !!
N'étant pas manuelle, je n'ai pas d'activités épanouissantes telles que la
peinture, le bricolage, la couture. Non. Pourtant j'ai essayé mais non. Cela demande patience, passion, talent...
Je suis dans ma prison dorée. Une prison mentale surtout je pense, mais je
sais qu'une sortie ou une passion, cela signifie des dépenses et que je ne peux/dois pas en
faire.
Ce n'est pas une vie direz-vous, et c'est aussi ce que je pense souvent en me morfondant, sentant la dépression guetter autour de moi tel un charognard...
Le mari, quand j'essaie de lui en parler, s'énerve et me dit qu'on ne
devrait pas se plaindre, qu'on a tout pour être heureux, grommelant et
retournant à ses activités, dans sa grotte.
J'en ai un petit peu marre...
J'ai besoin de changement. Je n'ai même pas l'énergie pour bouger et changer les choses. Je vais faire comme d'habitude, attendre de toucher le fond pour me mettre un coup de pied au fesses et repartir. Parce qu'au fond, ma vraie prison, c'est probablement cette vieille amie la dépression qui a toujours été tapie là, depuis aussi loin que je m'en souvienne, me paralysant quotidiennement.
C'est dur de mettre des mots là-dessus, mais si j'écris "ce qu'il y a dedans", c'est justement pour essayer de m'en sortir et avoir une vie à peu près normale.
J'ai dévié du sujet initial : je suis passée du calme de la maisonnée qui me fait du bien aujourd'hui, à l'inactivité et ce mal intérieur qui me ronge. Douée la fille !
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